mar. 26 sept. 2023

La négativité humaine et astrale

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Je tiens la négativité — une manière « moderne » et « pudique » de désigner ce qu'on appelle encore parfois le mal — comme quelque chose de fondamental pour comprendre le monde et nous comprendre nous-mêmes.

En astrologie aussi, la négativité joue un rôle crucial. Il y a peu, on parlait encore de planètes néfastes, et l’astrologie avait un caractère fataliste. L’astrologie moderne a rompu avec le fatalisme, mais elle ne peut pas rompre entièrement avec la négativité — à moins de se trouver dénaturée.

Pourquoi parler de « négativité » ? Et la « positivité » ?

Il y a, assurément, de la positivité, en nous et dans le monde !
Et la négativité elle-même est ambivalente. Elle a, ou peut avoir, un revers positif.

Mais je veux parler ici spécifiquement de la négativité pour plusieurs raisons : non seulement parce qu’elle est « essentielle » et omniprésente, aussi et surtout parce quelle est largement occultée.

Enfin, une des vertus de l’analyse de la personnalité astrale telle que je la pratique est de nous aider à nous emparer de notre négativité : à la reconnaître et à la localiser en nous.

En d'autres termes, l’astrologie nous offre la perspective d’apprivoiser notre négativité.

la négativité brute

Pour comprendre que l’astrologie nous offre la perspective « d’apprivoiser » notre négativité, il convient de distinguer soigneusement entre la négativité « pure » ou « brute », et la négativité astrale : si la première est factuelle, la seconde est seulement potentielle.

La négativité, « pure », ou « brute », est l’ensemble des maux qui affligent le sujet humain en général, — dont il peut être tenu pour (co)responsable. Par exemple : souffrance infligée à autrui et/ou à soi, mauvaise foi, mensonge, malhonnêteté, manipulation, tromperie (y compris à l'égard de soi-même), « oubli de soi », déni, déconnexion de « ce qui compte vraiment », etc.

Nous sommes tous diversement confrontés à cette négativité : à celle provenant d’autrui, et aussi à la nôtre — pour peu que nous en prenions conscience.

L’astrologie, on va le voir, a énormément à nous dire là-dessus…

elle est occultée

… Mais avant d'en venir à l’astrologie, il est utile à mon propos de faire comprendre que nous vivons une époque qui cherche à occulter la négativité. Un modus operandi des plus flagrands de cette occultation est — paradoxalement — l’injonction commune à « positiver »1,2.

Cette injonction se trouve à peu près partout où l’on regarde. Beaucoup d’efforts sont faits pour nous faire croire que nous vivons dans « le meilleur monde qui puisse être ». Je parle surtout du monde marchand libéral, qui cherche par tous les moyens à entretenir cette idéologie3, avec des objectifs somme toute assez clairs. Mais on retrouve cette idéologie à l’oeuvre dans le travail, les médias, à l’école, etc.

Pour moi, cette occultation de la négativité a des conséquences plus néfastes que sa reconnaissance, sa conscientisation, et sa « dénonciation ». Car son occultation nous expose à d’autres maux, éventuellement plus pervers, — que les psychanalystes connaissent à l’échelle individuelle sous les appellations de « déni », « retour du refoulé », « décompensation », etc. — que d’autres observent à l’échelle collective dans la manipulation de masse.

une époque plutonienne

Nous vivons une époque formidable plutonienne.
C'est une époque très particulière, soyons-en convaincus. Nous « venons », pour ainsi dire, de découvrir Pluton (1930), et de vivre sous son égide une transformation radicale du paysage humain. Une sorte de razzia. Les deux guerres mondiales dont le souvenir est encore fumant nous lèguent un monde post-totalitaire4, avec toute l’ambiguïté de ce néologisme.

Mais comme nous parlons de psychologie, arrêtons-nous un instant sur la psychologie qui émerge à l’époque de la découverte de Pluton :

C’est celle de Freud et de Jung ; celle des complexes, du déni, des mécanismes de défense, des pulsions de mort, de la libido, des conflits, de l’Ombre, de l’archétype du « mauvais parent », etc.

Il suffit d'y regarder à ses concepts clés pour se convaincre que cette psychologie est elle-même orientée vers une forme de négativité, commune, symbolique, qui se donne dans des analogies à l’obscurité, à la décharge brutale de l’énergie, au mensonge, etc. — En même temps qu’elle illustre, indubitablement, un approfondissement de la psychologie.

Il est curieux de retrouver le thème de l’occultation au coeur même de cette psychologie. C’est bien sûr l’inconscient — qui, par définition, est « caché » dans les profondeurs, — dont les contenus sont latents, et qui peut opérer, par exemple, par le déni.

Nous vivons toujours, il me semble, dans cette époque plutonienne, où la négativité est à la fois exacerbée et occultée.

Pour l’anecdote, le clin d’oeil ou la « preuve par neuf » (pour qui sait lire entre les symboles), en 2006, les « autorités astronomiques internationales » ont voté la « rétrogradation » de Pluton comme « planète naine ». Comme si on cherchait à occulter Pluton

la négativité astrale

L’astrologie a longtemps considéré Mars et Saturne comme des planètes néfastes. Les Anciens se seraient-ils juste « trompés » sur leur compte ?

Le croire serait céder pour partie à l’occultation dont on vient de parler. Mars et Saturne ont quelque chose de néfaste. On peut le tourner dans le sens qu'on voudra : ces planètes ont des « ressources en négativité » supérieures aux autres planètes (je parle ici du vieux septenaire, excluant pour l’instant les trans-saturniennes). Pour faire court :

Mars est « agressive ».
Saturne « régressive » (si on peut dire).

Mais il faut bien distinguer entre cette négativité astrale et la négativité « brute », dont je parlais auparavant.

Mars et Saturne ne sont pas que « agressive » ou que « régressive ».
Aucune planète n’est exclusivement néfaste.
Mars et Saturne sont seulement plus néfastes que fastes.
Elles ont aussi « leur bon côté », si on veut.

Leur négativité s’exprimera particulièrement lorsqu'elles seront reliées à d’autres planètes par des aspects dissonants. Ces dissonances sont d'ailleurs la seconde forme que peut prendre la négativité astrale (on s’en doute : la négativité des planètes sera « exacerbée » lorsqu'elles seront en dissonance entre elles).

Car la négativité astrale a un revers positif que n’a pas la négativité « brute » n’a pas (infliger une souffrance à autrui n’a pas de revers « positif »5).

On peut comprendre la négativité astrale comme un « aiguillon », ou un « moteur », multiforme et ambivalent.

Et l’énergie de la négativité astrale peut être transformée, transmutée, sublimée. On dit par exemple que Saturne peut « changer le plomb en or ». Et j'y crois.
Mais Saturne commence par le plomb.

Saturne, le travail et la négativité

Jusqu'à la découverte d’Uranus en 1781, le monde astral était borné par Saturne, visible à l’oeil nu. Saturne était — et reste, dans un sens — non seulement la planète de la limite, mais le symbole de nos limites.

Saturne est aussi la planète du sérieux, de la responsabilité, de la souffrance, et du travail.

Tout ces termes sont liés dans travail : le travail nous responsabilise, nous donne l’occasion de montrer notre sérieux, mais nous limite, et nous fait souffrir.

Le travail a un lien intime avec la négativité.
Dans son ouvrage de référence sur le travail, Souffrance en France, Christophe Dejours dresse un portrait pour le moins ambivalent de ce qui remplit une bonne part des emplois du temps des Français. Il suffit de jeter un coup d’oeil sur le sommaire pour s'en rendre compte :

Le travail entre souffrance et plaisir.
La crainte de l’incompétence.
La contrainte à mal travailler.
Honte et inhibition de l’action collective
Émergence de la peur et soumission
De la soumission au mensonge
L’acceptation du « sale boulot »
… la valorisation du mal
La rationalisation du mal
L’aliénation
La banalisation du mal

Mais pour l’astrologue, l’injonction au travail n’a pas qu'une origine sociale. Car Saturne nous enjoint au travail de l’intérieur.
Pas au travail « salarié », aux bullshit jobs ou au STO, mais à la réalisation et à la limitation de soi par le travail, et dans l’ambivalence entre plaisir et souffrance.

Le travail révèle l’omniprésence de la négativité saturnienne dans notre quotidien.

Je m’arrêterai ici, après avoir indiqué que la négativité est à la fois omniprésente et occultée dans le paysage humain, et qu'on a de quoi gagner à la comprendre dans un cadre astral.

Vous aurez un aperçu schématique de votre négativité astrale — et de votre positivité astrale ! — avec votre Graph et avec votre Book .

N’oubliez pas de considérer votre négativité dans son ambivalence, — et dans la perspective de sa transmutation.
Pour cela, pensez à un parcours d’accompagnement.

Voyez aussi mon autre article, Le Rose et le Noir.

Notes de bas de page:

1

Voir les analyses de Jean-Pierre Le Goff in La Barbarie Douce, la modernisation aveugle de l’école et de l’entreprise, 2003.

2

Certes, nous faisons face aussi à une négativité de surface, via la marchandisation de la peur, par exemple, — et à ce que les Anglais, parfois plus forts que nous en métaphores, appellent fear porn. Mais souvent, cette négativité est artificielle, instrumentalisée, sinon fabriquée, et dérive d’une négativité plus fondamentale.

3

On peut parler ici de l’idéologie du « positivisme », à condition de la distinguer du positivisme philosophique.

4

Cf. La Démocratie post-totalitaire, de Jean-Pierre Le Goff. La Découverte, 2005.

5

Même si, ici encore, on pourrait encore distinguer et discuter, — par exemple de la punition. Mais je me tiendrai ici à des généralités de bon sens.